COMME UNE RÉSONNANCE

Lieu : Centre de repos de « *Bouvignies », dans le Nord de la France

Les personnages dans ces scènes:

Jules et Julie, personnages des scènes « Intérieurs jours/nuits »,

Lui qui devient Jules au cours de la pièce, personnage des « scènes Intérieurs jour/nuit », amoureux fou comme un jeune premier de (Elle/Julie), tragédien, fragile, sensible, amusé d’être différent, se joue au jeu de l’amour.

Elle qui devient Julie, autonome, lucide, fragile et mûre, douce, et naturellement maternelle.

La Narratrice, très sensuelle, mûre, entre 30 et 40 ans, moderne, porte toujours les talons hauts, elle est tout à la fois, elle joue les rôles de présentatrice, de narratrice, l’actrice de sa propre vie, et du temps qui passe.

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Intérieur II (jour) scène 3 –

Musique/La Narratrice. La narratrice traverse le centre de repos, et se relate un bref souvenir en marchant, très nostalgique, et enfantine.

La narratrice.                                                                                               Sur la route, en traversant, je me suis vue comme pour aller à l’école ; pour bien être éclairée, des lampadaires, une route goudronnée, des arbres, des maisons, de chaque côté, en briques rouges, accolées les unes aux autres, comme indécollables, semblables aux autres.
Des souvenirs longs, des trottoirs gris, étroits, salivant de saleté, un bruit continu de voiture, à vive allure, je marchais moi aussi, d’un pas pressé, comme pressée de ne pas me souvenir, mais il venait lui-même, me frapper, je marchais toujours à vive allure, fière, toujours pressée, ne t’arrête pas, surtout, ne t’arrête pas, mais il frappait à la porte, plus fort, encore, pour ne pas oublier, ces souvenirs, ne pas oublier…l’urbaine, la ville et l’odeur.
Le bruit du bus qui se freine, comme pour freiner sa frénésie, il prend en route les passagers, de cette longue rue interminable.

On les entend au loin marmonner, se rapprocher toutes ensemble ; les pleureuses toujours un peu dans l’ombre, gémissent, crépissent.

Intérieur (nuit) Scène 5 –

La narratrice.
Sa silhouette nous laissait à chaque fois comme une sorte d’énigme à élucider, comme un nouveau goût du mystère contemporain.
Elle, elle était bien contemporaine, lui était très moderne, plus jeune de 3 ans, jeune fougueux il la suivait, quand il sentait en elle, un départ affirmé.
Cette fois c’était le bon, comme un rêve éveillé, elle continuait la route, confirmée, de quelques gestes. Une route à laquelle elle ne pouvait échapper, ensemble.
Pour elle, elle se sentait suffisamment forte pour enfin lui révéler son identité.

Elle se parle à elle-même, en parlant de lui, angoissée, elle.

Elle. Je lui dis avance, avance, tu voulais marcher pour prendre de l’avance, alors avance bordel…
Il me suivait toujours du regard, comme un petit chien, tortillant, comme un petit, mais il m’aimait ! Il me suivait essoufflé, mais il me suivait quand même!
C’est toi que j’aime me disait-il, je le laissais faire, par principe.
Je m’abandonnais à la lumière du jour, je prenais le temps de m’allonger un instant, et de contempler, l’incomtemplable, un ciel gris, des nuages rougeâtres, des mouettes, cette fois, alignées, les unes aux autres.
Plus bruyantes encore, qu’un bruit sourd, des notes grinçantes, aigues, te voilà légère me dis-je, prête à me laisser guider, échappée d’un long silence.

Intérieur Jour (8) scène 16 –

Ils avancent l’un vers l’autre, le pas fragile, délicat, très chorégraphique.

Jules/Julie.

Jules.
C’est drôle, j’ai peur !!
Julie.
Ah oui, moi aussi !!
Jules.
J’ai peur du vide…
Julie.
..Et moi j’ai peur du vide et de la mort…
Jules.
..Et moi j’ai peur, du vide, de la mort, et de l’infini…
Julie.
..Et moi j’ai peur, du vide, de la mort, de l’infini, et de l’éternel recommencement…
Jules.
Ah ? Tu crois ? Tu crois vraiment ? Les choses ont une fin, c’est connu…
Julie.
Les choses ont une fin, Jules, parce que la vie s’achève ainsi, elle se termine, pour ce qui reste des vivants ! Mais morts ? Quelle différence Jules ? Dis-moi ?
Jules.
C’est vrai ! Quelle différence ? Puisque nous sommes bien vivants, et la mort alors ? La mort est-elle vivante ? Une conscience que l’on ne soupçonnerait pas! Un esprit ! Une mémoire collective ! Un amour éternel ! Une caresse !
Une éternelle jeunesse Julie ! Je t’aime Julie, comme jamais….je…
Julie.
Chut…il fait bon, il fait chaud…tu n’ trouves pas ? T’as déjà mis les mains dans la terre ?
Jules.
Non, mais…
Julie. (Chuchotant) Chut…oh comme c’est bon, regarde, trempes les, tu trempes tes mains dedans, et tu les enfonces jusqu’au bout Jules, jusqu’à t’en mettre dans l’intérieur de tes plis, et c’est bon, tu vois tu te colores, comme un véritable asticot qui jaillit du fond de sa bulle d’air, il profite lui aussi pour reprendre un peu de sa respiration.
Jules.
Je vous aime…je vous aime comme un fou…
Julie.
Chut… J’aime pas les regrets, j’aime pas ceux qui s’apitoient sur leurs sorts, j’aime pas les plaintes inutiles ! J’aime pas la médiocrité ! J’aime pas la réussite facile ! J’aime pas les maisons de retraite ! Mais j’aime ma grand-mère !
Jules.
Vous m’aimez, n’est-ce pas ?? Julie dis….vous m’aimez ?
Julie.
Je…vous…trouve, enfin magnifique ! Vous me donnez votre amour, si….fraternellement, je vous aime…
Jules.
Votre beauté…Julie, oh heureuse beauté ! Vos yeux sont comme des étoiles à faire rougir un ciel, votre voix si harmonieuse, Julie ne retenait qu’une chose, qu’un amour, quoi qu’il arrive, se partage….
Julie.
En vidant le doux secret de nos cœurs, c’est ça… celui d’être frère et sœur.
Jules.
Je vous nourris Julie, de la nourriture des amants…
Julie.
Jules, nous ne sommes que des enfants, encore que des enfants, Jules.

Noir.

Notes d’auteur
Je veux mourir que si je reste vivante

Extraits de pièces de théâtre
Je veux mourir que si je reste vivante extrait
Comme une résonnance – extrait
Variations sonores – extrait